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Histoire des sous-marins en Bretagne : des premières inventions du XVIIe aux sous-marins nucléaires
18 décembre 2017 - 14h30 à 17h00
par M. Bernard FOUCAULT
Formateur en plongée sous-marine et spécialiste d’histoire maritime, primé par l’Académie de Marine, Bernard FOUCAULT a travaillé pendant plus de deux ans sur les archives et les documents iconographiques pour mettre en évidence le lien majeur entre la Bretagne et les sous-marins.
Léonard de Vinci en avait rêvé : un navire capable de se déplacer sous la mer ! Toutefois, ce sont des inventeurs comme Fulton et Payerne qui réussirent à mettre au point cette machine fabuleuse, célébrée par Jules Verne dans Vingt mille lieues sous les mers. Mais qui sait que leurs essais eurent pour théâtre les eaux de la Manche, les ports de Bretagne ?
Incroyables prouesses… Et terrible destin ! Car il devait être écrit que les sous-marins, devenus armes implacables dans les mains allemandes, reviendraient chasser le long de nos côtes, durant les deux guerres mondiales. Ce furent alors l’aventure sous-marine de Lorient, Brest et Saint-Nazaire, puis la bataille de l’Atlantique, sur fond d’Occupation. Ce fut aussi l’épopée nucléaire de l’île Longue. Une page d’histoire, toujours vibrante, que Bernard Foucault fait ici revivre.
Synthèse de la conférence de Monsieur Bernard FOUCAULT donnée le 18 décembre 2017, à lire en début de séance le lundi 22 janvier 2018
La conférence du jour est assurée par Monsieur Bernard FOUCAULT avec pour sujet : l’histoire des sous-marins en Bretagne.
Le conférencier introduit son propos par un large panorama historique depuis 1639 : il est attesté que le Père Mersenne, religieux érudit, dresse à cette époque le plan d’un sous-marin à rames en détaillant son fonctionnement. C’est le Malouin Jean Barrié dit de Pradine à qui revient le mérite d’avoir construit une cloche de plongée pour mener à bien la recherche des épaves quelques années après. Différente recherches seront poursuivies au XVIII ème siècle, à Brest notamment : elles aboutiront au 1er sous-marin, le Nautilus de Robert Fulton, américain, installé à Paris pour y concrétiser son projet. La reproduction du Nautilus est exposée à la Cité de la Mer à Cherbourg. Les essais se déroulent en juillet 1801 à Brest ; ils s’avèrent concluants. Fulton fait la preuve de la capacité offensive de ce type de navire qu’il équipe d’une torpille. Napoléon, très intéressé par cet aspect dont il entrevoit l’importance dans le conflit avec l’Angleterre perd patience devant la lenteur de Fulton à maîtriser tous les paramètres lui permettant d’obtenir une vitesse suffisante, une autonomie en plongée conséquente et une capacité fiable de torpillage ; il retire son soutien à Fulton qui trouve un meilleur accueil auprès des Anglais.
Il faut attendre 1899 et Maxime Laubeuf pour voir la construction à Cherbourg de navires à double coques : ballastre et coque résistante à la pression qui préfigurent les sous-marins modernes. Le Narval dont la photo dans le port de Saint-Malo en 1901 illustre l’annonce de cette conférence sur notre site Web et sur les affichettes diffusées à cette occasion, présente toutes les caractéristiques d’un navire redoutable avec l’emport de quatre torpilles.
La Grande Guerre confirme l’importance stratégique pour un pays de détenir, en grand nombre, ce type d’armes. D’ailleurs, les Allemands rencontrent des succès spectaculaires en attaquant les navires alliés, de guerre ou de transport mais ils obligent leurs adversaires (Anglais et Français principalement) à former des convois pour en assurer la sécurité. Le torpillage en mai 1915 du paquebot « Lusitania » provoque une prise de conscience chez les Américains que la neutralité des USA ne peut être maintenue puisque la libre circulation sur les océans n’est plus assurée. Les efforts pour contrer les U-Boote se portent vers lta multiplication des hydravions et des ballons installés sur des bases construites par les Américains sur toutes les côtes bretonnes ; ils protègent ainsi la navigation de proximité et plus spécialement les bateaux de pêche bretons. Cette stratégie de riposte est largement dûe à la volonté du ministre français de la Marine, l’Amiral Lacaze.
Dès que les premiers réarmements sont décidés après le traité de Versailles, la construction des sous-marins est accrue de façon significative par l’ensemble des pays. L’Allemagne mène un programme secret de construction dès avant 1935 et l’accentue ensuite car elle est convaincue que leur utilisation sera déterminante dans un probable futur conflit.
En 1940, quand la France est partiellement occupée, les Allemands s’installent sur tout le littoral de Dunkerque à Bayonne : l’amiral Dönitz décide d’implanter des bases protégées pour les sous-marins dans cinq ports dont trois bretons : Brest, Lorient et Saint-Nazaire. Les abris bétonnés sont d’une telle ampleur qu’ils résistent aux bombardements des alliés qui causent d’énormes dégâts collatéraux dans ces villes. L’organisation Todt a la charge de leur construction : c’est un immense chantier qui a concerné quelques entreprises mais surtout qui a utilisé des prisonniers de guerre et autre main-d’œuvre asservie par les Allemands. . Notre orateur décrit alors chacune des bases à l’appui de photographies qui expliquent bien l’invulnérabilité de telles installations. La maintenance et l’approvisionnement des U-Boote se déroulaient donc dans des conditions très satisfaisantes de sécurité. Compte tenu de la présence de nombreux soldats et marins à Brest, Lorient et Saint-Nazaire, la vie des populations est naturellement impactée , que ce soit par les exigences découlant d’une occupation militaire ou par la réquisition de châteaux et d’hôtels mis à la disposition des officiers sous-mariniers lors de leur retour de mission.
Revenant à la stratégie utilisée par les Alliés, Bernard Foucault précise les raisons de la fin de la suprématie allemande en évoquant l’utilisation systématique des avions, quelquefois à partir de porte-avions, dans la lutte anti sous-marine, le décryptage des communications allemandes à la suite de la prise d’une machine « Enigma » par les Anglais (nous aurons l’occasion d’approfondir ce sujet lors de la conférence d’avril prochain) et l’apparition de l’ASDIC améliorant très nettement la localisation des sous-marins, éléments auxquels il faut ajouter le rôle de la Résistance qui espionne les Allemands et renseigne les Alliés sur la plupart des mouvements des navires.
Le débarquement du 6 juin 1944 et la progression des alliés en août 1944 aboutissant à la libération de la Bretagne ne signifient pas pour autant la fin des combats puisque les Allemands se retranchent dans les villes qu’ils ont fortifiées de façon à priver les alliés de ports d’approvisionnement pour leurs troupes. Saint-Malo sait bien les souffrances que les autres villes bretonnes ont enduré pour les avoir subies elle-même !
La dernière partie de la conférence a trait au renouveau de la flotte sous-marine française, aux sous-marins modernes puis, à partir de 1960 à l’apparition des sous-marins à propulsion nucléaire, lanceurs d’engins balistiques y compris nucléaires : « Le Redoutable », premier des SNLE entré en service en dec. 1971, complété au début des années quatre-vingt par « Rubis » premier SNA en 1983. Mais nous entrons dans un chapitre qui fait partie des sujets sur lesquels une grande discrétion est de rigueur… Bernard Foucault termine son intervention en mentionnant la base de l’Ile Longue, dans la rade de Brest où sont installés, depuis 1972, les SNLE dont l’activité représente un poids économique important dans la Région Bretagne. Les autres installations dont il a été question au cours de la conférence ont été confiées aux collectivités locales pour un usage civil ; le plus souvent tourné vers le nautisme et les arts.